Zéno Bianu – Petit éloge du bleu – Folio Gallimard, 2020


Il y a le bleu Klein et désormais le bleu Zéno tant le poète ne cesse de parcourir et décliner cette palette azurée à travers l’ensemble de son œuvre. L’indigo Bianu est une sorte de saveur particulière, une façon d’être au monde, d’appréhender les choses, de savoir regarder ou écouter…cet « emportement céleste ou saturation de lumière ». De la peinture à la musique se déploie tout une gamme de bleu porteuse de cette énergie mélancolique propre au blues et à la poésie. Le déploiement de la couleur bleu devient alors le paradigme de l’univers entre astrophysique et métaphysique : « la toile de fond du monde où nous évoluons. Le bleu telle une clé absolue : clé de sol, clé des songes, clé des champs. Le bleu au diapason des infinis. » Cette histoire du bleu finit ainsi par se confondre avec une sorte d’autobiographie amoureuse, une boussole ou un « alphabet des exaltations », l’histoire d’une vie en somme vouée à l’intensité, d’où cet éloge ardent de cette couleur de l’infini… Il y a ce bleu apnée où apprendre à mourir, la note bleu du blues, la couleur des Iris peints par Vang Gogh ou la fulgurance d’un haïku célébrant l’éphémère, la couleur bleutée des galaxies en expansion ou des monts décrits par Wang Wei excellant à rejoindre cette lueur de « lait bleu » qu’il loge au cœur des choses : « Il reste en quête de ce moment parfait où, selon un maître vertigineux comme Li Ho, « un parfum de pluies subtiles/bleuit tout l’espace », cet instant accompli où, pour reprendre Sié Ling-Un, autre adepte vénérable, nous glissons « au profond sans fin de l’ombre bleue. » Ainsi cette quête n’est autre en définitive « qu’un désir de coïncider dans l’instant avec la pulpe du réel ».cette couleur devient celle de la vie toujours renaissante perçue « comme un viatique ébloui – une fusion continue entre pensée et sensibilité. » Un très bel inventaire pour passer une heure bleue…

Revue Terre à Ciel

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