Marc Alexandre et Oho Bambe – La vie poème – Montréal, Mémoire d’encrier, 2022
Deux voix vibrantes se mêlent et se mélangent dans ce très beau recueil pour dire et déclamer la passion poétique. Ainsi entre le monde et soi, il y a toujours un poème ou « un poète offrant une vision, un visage. » Cette part manquante qui définit l’humain, cette vacance à être ne peut-être comblée que par la poésie. Pas seulement celle qui est enfermée dans les livres mais la poésie du monde dans sa beauté intraitable et sa force de résistance au cynisme et la violence.
La vie devient alors un présent ‘« à s’offrir chaque jour », où il convient « d’écrire comme on plante des arbres » pour ne pas « mourir inutile » et devenir un marcheur et un chercheur d’art. La vie poème s’inscrit comme « un chemin d’errance et d’existence, adossé au sens et au silence des choses qui s’enfuient ». Sous l’ombre des manguiers, à travers le refuge d’un livre surgit un « bouquet de mots/de lumière » comme une main tendue. Elle survient comme « ce qui nous permet de supporter le monde » comme l’écrivait Aimé Césaire. Plus rien ne compte que de « transformer en poème les pulsations de son cœur ». Dans ces fragments « d’un discours poétique amoureux », se déclame à la fois l’amour de la vie et du poétique permettant de s’extraire du monde et de garder capacité d’altérité : « se souvenir de/ne pas perdre de/vue/la vie et de l’écrit. » Il convient alors d’inventer son chemin sans cesse et « chevaucher sa chute » pour poursuivre le voyage et de « tout paysage/garder intense/la trace du passage ». Cette quête universelle se poursuit à travers chaque poète et traverse le temps : « Il y aura toujours/une femme ou un homme poème ou poète/pour nous dire/résiste ou meurs/va vis et deviens/le poème que tu portes/la femme ou l’homme qui vogue libre/dans le tumulte du monde. »Extraits
« Où je vis ?
Dans une phrase ambulante
Simple et lumineuse
Comme un jour clair et beau
Aube nouvelle
(…)Où je vais
Seuls les poèmes le savent »
« Il y aura toujours
une femme ou un homme
poème ou poète
pour nous rappeler
au désordre et à l’ordre
et à la lumière de nous-mêmes
au doux soleil de nos espoirs d’argile
et de nos quêtes, délicates fragiles
la femme ou l’homme qui va, vibre
dans la tendresse du monde
Il y aura toujours
un poème
pour toi et toi seul(e)
pour guider tes pas
ordonner tes silences
recoudre ta parole blessée
tisser l’aube et faire advenir le jour
(…)
il y aura toujours
un poème
ou un poète
Aimé
un Cahier d’un retour
à soi
à la vie
à la poésie
à la poésie de la vie
malgré toute la violence du monde »
Véronique Elfakir - Revue Terre à ciel
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