Note de lecture Revue Terre à ciel - Roselyne Sibille – Une libellule sur l’épaule – L’Ail des ours n°25 

    Dans ce nouveau recueil, Roselyne Sibille poursuit son exploration des paysages et des saisons changeantes de la vie. Quand le « jour lentement/ prend appui sur les gris » émerge tout un monde de sensations et de seuils ou passages successifs à l’image de ces « deux oiseaux blancs » survolant « le fil de leur reflet ». Il convient alors de « caresser un nuage » et « d’écrire au silence » comme pour mieux s’effacer et contempler ces petits miracles ou grâces quotidiennes que nous délivre la nature en ces métamorphoses. Ainsi la lumière ne cesse d’attendre son poème, attentif au recueil de chaque signe délivré à travers ce mystère de la création que nous ne pouvons que nommer : « Le point du soleil/épine éblouissante/perce le grand discours/des arbres à contre-jour/J’avance/attentive au prochain signe/Le chêne a tracé/des majuscules en clair-obscur/Leur énigme est la même/dans toutes les langues. » De cette lecture attentive du plus infime même : fissures d’écorce, sons d’oiseaux, bruits d’eau de la rivière riant dans la vallée, vol d’hirondelle, émerge une sorte de rayonnement irradiant ou de ravissement. L’écriture devient « musique des libellules », aussi diaphane que leurs ailes tout en sachant que « les parois des phrases » restent toujours de l’autre côté. Dans le crépuscule tombant sur la montagne, émerge une sorte de paix ou de fusion où il s’agit alors d’écouter « chuchoter le cosmos » et d’en recueillir les pétales. Le poème se fait alors écho de l’univers, en résonance avec ses parfums, où il suffit d’une seule graine de lotus pour déployer un rêve et inventer « la carte des levers de soleil ». Peu à peu le poète vécu comme un scribe de toutes ces images déployées disparaît et c’est les nuées même qui écrivent le poème ou « la grenouille rousse ». Dans « la main vive du monde », les « phrases se cachent et se replient »« l’arbre éparpille/un alphabet troué » mais à l’image du vent comme une calligraphie, le pinceau se doit d’être léger comme une encre de Chine car « regard au ciel/on sait/Personne ne démêlera la joie. » 

Extraits 

« Le point du soleil épine éblouissante perce le grand discours des arbres à contre-jour J’avance 
Attentive au prochain signe 
Le chêne a tracé 
Des majuscules en clair-obscur 
Leur énigme est la même 
Dans toutes les langues »

« Dans les fissures d’écorces 
Je tente de lire 
De comprendre 
Ou d’entendre 
De trouver 
En moi 
Une traduction »

« En arrêt 
Ne pas déranger 
Orteils hésitants 
Le poème d’automne 
Agencé par les brindilles 
Sur le sol »


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  "Peut-être encore nous défendra le chant d'un oiseau, une étoile qui nous donne sa faveur, la ligne bleue des monts dans l'or...